Alone Man Show par Pascal Légitimus

Vous aimez l’humour embarrassant ? Vous frissonnez d’aise devant les interminables plaisanteries de David Brent dans The Office UK ? Courez vous acheter Alone Man Show de Pascal Légitimus. Vous aurez le plaisir ultime d’accéder à une heure trente (+ une bonne grosse demie heure de bonus !) de gêne totale, naufrage humoristique d’un vieux de la vieille à qui on n’ose pas dire qu’il ne fait plus rire personne.

Synopsis

Comme il le dit lui-même, Pascal Légitimus a toujours été arménien dans la vie et antillais sur scène. Mais aujourd’hui, il est prêt à vous dévoiler toutes ses facettes. Du rire, du délire, du visuel, des révélations, des émotions. Après plus de 120 représentations partout en France, Pascal Légitimus débarque enfin chez vous.

Critique

maxresdefault

On l’avait vu venir, le naufrage. J’ai un peu de sympathie pour Pascal Légitimus, du fait de son implication dans une des bandes les plus efficaces de l’histoire de la blague française, les mal nommés Inconnus (si vous vous souvenez pas que Légitimus en a été, vous inquiétez pas, il le rappelle toutes les cinq minutes dans le spectacle). Mais ne nous mentons pas : c’était pas lui le moteur de l’affaire. Il avait sa place dans la dynamique, il participait au timing impec des phases à trois, mais jamais ce n’était le clou du sketch, jamais Légitimus n’a été votre Inconnu favori. De fait, Campan et Bourdon s’en sont bien passés dans Le Pari. De là, on suppose logiquement que Légitimus seul en scène ça ne doit pas trop tenir la route. Par ailleurs, le récent Les Trois frères, le retour nous a permis de faire l’état des lieux de l’énergie comique du trio. Résultat des courses : les bougres n’ont pas perdu le rythme mais ne sont plus capables d’invention. Ils se contentent de rejouer leur tube. Et quelque part, pourquoi pas ? le fait est que ça suffit à constituer un divertissement correct.  Mais si l’on ajoute cette fatigue d’inspiration à cette faiblesse de jeu du Légitimus isolé, on pressent l’accident. Malgré tout, n’allez pas croire que je partais fâché d’avance. Préférant le rire à l’ennui, j’étais disposé à la marade.

alone-man-show_95513851_1

Le spectacle a au moins le mérite d’une certaine forme de générosité. Ça bifurque beaucoup, il y a de la zic, de la danse, des vidéos ; l’humour aussi n’est pas uniforme, on passe de gags absurdes comme pourraient en proposer Tsamère à des jeux de mots type Devos, en passant par des sketchs traditionnels où le comédien incarne un personnage “haut en couleurs”, qui s’adresse à d’autres personnages invisibles (si ce procédé a un nom et que vous le connaissez, faites péter, je suis avide d’apprendre). Mais cette diversité au bout du compte est une inconsistance. Légitimus fait un peu de tout car il n’a rien à raconter. On a l’impression qu’ils ont construit le spectacle comme ça : “Bon on est à 45 minutes de show, qu’est-ce que tu sais faire d’autre ? – Euh jouer de la guitare ? – Ok on va faire 5 minutes là-dessus, quoi d’autre ?”.  Le spectacle, globalement, confirme l’a priori. Légitimus capitalise sur les succès passés, auxquels il fait beaucoup trop et beaucoup trop complaisamment référence tout du long d’Alone Man Show (il réutilise plusieurs fois – entre autres ! – le fameux “eh Manu tu descends / eh pour quoi faire”). Quant aux blagues inédites, c’est du tréfonds de tiroir, y a des petits copeaux de bois servis avec tellement ils sont allés gratter loin, le tout mis à la mode stand-up bâtard post-Jamel (je suis noir et arménien LOL). Pour vous dire, à un moment Légitimus ironise sur ses premiers pas au théâtre de Bouvard en rejouant ses premiers gags. Parmi lesquels : “je viens d’une grande famille de comédiens, mon grand-père a joué Othello, ma grand-mère Nutella.” Il s’empresse de préciser que ce sont des “vannes de jeunesse”. Sauf qu’on ne voit pas du tout la différence avec ses vannes de vieillesse (“quand on entend un Turc parler comme ça, on a les Istanboules”). Le plus curieux est qu’il ne cherche même pas à nous les vendre, ses calembours. C’est un des one man shows les plus désimpliqués que j’aie vu, Légitimus certain qu’il a déjà tout prouvé fournit le minimum d’efforts.

1423663353_photo_hd_22645

Les bonus du DVD fournissent d’autres éléments de malaise, soit qu’ils prolongent le spectacle (dans “Timus family” Légitimus commente des photos de famille avec un entrain similaire), soit qu’ils auto-promotent sans vergogne (dans “Les amis connus… et inconnus” vous pourrez admirer toute la gamme des amis et disciples de Légitimus dire à quel point le spectacle est réussi). Mais voici, pour finir sur une note positive, la liste intégrale des blagues qui m’ont fait rire dans le spectacle :

– face au nouveau petit copain de sa fille, Kaiser, sorte de gothique percé tatoué à la langue coupée en deux, “T’es bilingue ?” (rire de moyenne qualité, avec les lèvres fermées qui font pfrrrr) ;

– Légitimus remercie ses parents de ne pas lui avoir donné un nom traditionnel antillais, et le premier exemple qu’il donne est “assomption” (vrai bon rire, un peu gâché ensuite par la surexploitation de la blague).

Total
6
Partages
Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Articles sur le même sujet