Didier Caron est l’auteur et le metteur en scène du Jardin d’Alphonse, une pièce à l’affiche du théâtre Michel pour encore quelques jours. Une comédie douce-amère jouée comme en plein air, mais imaginée comme un huis-clos. Didier Caron et huit autres comédiens interprètent une bien drôle d’histoire à tiroirs, où tous les personnages dévoilent à tour de rôle leur part d’ombre, à l’ombre d’un arbre.
Après la disparition du vieil Alphonse, les amis proches et la famille Lemarchand se rassemblent dans son jardin pour déjeuner. Magali en profite pour interroger son père sur une question qui la taraude depuis des années. La réponse est inattendue. Les petits secrets comme les grands vont alors éclater sous le pin parasol du jardin d’Alphonse.
La scène du théâtre Michel s’est métamorphosé en un décor bucolique, imperturbable et rassurant. C’est en effet au beau milieu d’un jardin, qu’un arbre aussi superbe qu’imposant, veille à la tranquillité d’une famille et d’un couple d’amis. Du moins en apparence. Car ses branches bienveillantes et protectrices vont rapidement se transformer en un lourd couvercle posé sur une véritable marmite en pleine ébullition… Les rancœurs les plus enterrées, et les secrets les plus enfouis, vont alors refaire surface les uns après les autres.
L’auteur a su donner un véritable rôle à chaque comédien, et donc une réelle importance à chaque personnage. Certains d’entre eux sont bien évidemment plus attachants ou émouvants, tandis que d’autres se révèlent très antipathiques voire (momentanément) détestables. Faire évoluer sur une scène, une petite dizaine de personnages est un audacieux défi, car cela demande une mise en scène particulièrement fluide. Et c’est ici réussi, d’autant plus qu’il y a un juste équilibre entre les répliques et les situations. L’enjeu dramatique de chaque protagoniste est ainsi particulièrement bien exposé à travers son passé, son présent mais aussi… son futur.
Cette comédie réserve donc aux spectateurs de nombreux rebondissements, car la mécanique de la pièce est plutôt bien huilée. Mais à l’inverse, une telle mécanique apparaît ici et là comme répétitive, même si l’intrigue ou plutôt les intrigues se suivent avec beaucoup d’intérêt. La construction narrative est en effet un bel exercice de style, loin d’être facile, mais qui atténue dans la forme, l’étonnement légitime quant la progression d’un récit. Et dans ce magnifique décor, quelques jeux de lumières supplémentaires pour ce ciel qui s’assombrit au fil du récit eurent été intéressants.
Si le jardin d’Alphonse est le lieu de tous les ressentiments à ciel ouvert, c’est aussi une comédie tantôt légère, tantôt irrésistible. Lorsque Karina Marimon, une formidable comédienne, lance tout au long de la pièce ses répliques aussi inattendues que cinglantes, c’est toujours pour la plus grande joie des spectateurs ! Et son personnage, entre naïveté et gentillesse, affaibli illico la tension qui règne régulièrement dans ce jardin… du moins momentanément. Et le plaisir que prennent les comédiens sur la scène du théâtre Michel, à interpréter leurs propres histoires dans l’Histoire est visible et communicatif.
Si j’étais un arbre, je serai…
Le Jardin d’Alphonse est une véritable saga familiale retracée sur plus d’une heure et demie, où les langues péniblement se délient. Et confortablement installés, les spectateurs sont face à une fenêtre ouverte sur ce jardin, et sont témoins des dénouements successifs pourtant aussi inextricables que les racines d’un arbre. Quant aux personnages, aucun visage n’est représenté sur l’affiche de la pièce, mais il y a autant d’arbres dessinés que de rôles ! Soit 9 au total et sous lesquels on peut lire le nom des neuf comédiens. C’est original et accrocheur, surtout quand on s’amuse une fois le spectacle terminé, à relier chacun des neufs arbres aux traits de caractère de chacun des neufs personnages !
En soirée à 21h00
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