Enlever Carmen à l’Opéra, pour le jouer à tout prix sur les planches d’un Théâtre, est l’une des originalités du spectacle de Sophie Sara, mis en scène par Manon Savary. En effet, le classicisme originel de l’oeuvre de Georges Bizet étant habilement mis de côté, cette adaptation révèle alors un nouveau rythme musical et offre aux spectateurs une fantastique exaltation lyrique.
Argument
Tout aurait très bien pu se passer pour cette grandiose représentation de Carmen de Bizet, sans un petit incident de dernière minute… Vent de panique dans le théâtre où plus rien ne se déroule comme prévu. Cinq comédiens chanteurs et trois musiciens perdent la raison et vous emmènent dans une comédie hilarante et rythmée où vous pourrez entendre les plus grands airs de Carmen.
Un théâtre loufoque dans un théâtre burlesque
D’emblée, le comique de situation marque cette adaptation, en utilisant délibérément pléthore d’éléments loufoques. D’une part, la trame de la pièce renvoie à deux narrations principales et simultanées : Celle de Carmen mais aussi celle des acteurs s’évertuant, coûte que coûte, à jouer Carmen. D’autre part, les costumes, les décors plutôt bringuebalants et la mise en scène dynamique qui, somme toute, nous déstabilisent dans une premier temps, nous cueillent ensuite de par leurs inventivités.
Des musiciens et des comédiens
L’orchestre symphonique s’étant volatilisé, le directeur du théâtre part dénicher trois musiciens tziganes et ce, quelques minutes avant le lever de rideau ! Ces derniers doivent alors interpréter les plus grands airs de Carmen avec leurs instruments aussi disparates les uns que les autres tel qu’un saxophone, une guitare, un violon mais aussi… un accordéon. Et cet ensemble hétéroclite se révèlera aussi talentueux qu’inattendu en amenant une nouvelle musicalité ainsi qu’une résonance festive à cet opéra.
Les passages lyriques, sur lesquels viennent jouer et chanter les comédiens, se révèlent particulièrement divertissants. Dès le premier acte, on reste admiratif devant la reprise totalement jouissive et exaltée de « L’amour est un oiseau rebelle ». Sans nul doute, la chanson la plus célèbre de cet opéra dont la mise en scène, offre ici, le décalage le plus burlesque du spectacle. Viendra également lors du deuxième acte, un morceau presque aussi célèbre, celui du «Toréador », qui, interprété par un gréviste fraichement remotivé marquera à jamais l’histoire du théâtre grâce à son imposante présence scénique 🙂
Quant à la structure de la pièce, les quatre actes ont été rigoureusement respectés par un baisser de rideau et un changement de décor. Néanmoins, ces très courtes transitions mériteraient d’être re-musclées pour maintenir l’enthousiasme des spectateurs.
Une vraie réussite
La vitalité musicale de Carmen, qui est l’un des opéras les plus joué au monde, permet cette revisite en entrainant, tel un rouage, cette mise en scène survoltée et ce jeu d’acteur diablement varié. Et au delà du plaisir partagé, ce qui nous gagne à l’issue de la représentation comme gage ultime de la réussite de ce spectacle, c’est l’envie de (re)découvrir à tout prix, Carmen, l’oeuvre de Georges Bizet.
Carmen à tout prix.
Théâtre Trévise, Paris.
Les jeudis, vendredis et samedis à 21h30