Explication des meilleurs albums de David Bowie

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David Bowie en quelques chiffres c’est : 27 albums studios. 128 singles. 54 ans de carrière. 37 films en acteur ou caméo. Bowie est un artiste accompli, une icône de la musique, une figure publique. Avec sa musique, il créé un pont entre le monde réel et le fantasme. Vie extra-terrestre, sexualité, religion, humanité sont autant de thématiques abordées et qui amènent à réfléchir.

Sa mort en 2016 à l’âge de 69 ans et seulement deux jours après la sortie de son 27ème album studio Blackstar frappe l’univers de la musique. Bowie est partout : sur les Unes, mais aussi affiché dans les lieux publics pour la promotion de Blackstar. La station de RER Nation à Paris était d’ailleurs recouverte d’affiches pour l’album.

Ses titres phares sont tous internationalement connus et souvent devenus intemporels alors qu’ils ont pourtant été principalement écris et composés dans les années 1970 à 1990 : Heroes, Changes, Starman, Space Oddity, Let’s Dance, Life on Mars?, Rebel Rebel, Modern Love. Sans oublier d’évoquer le magnifique Under Pressure enregistré en studio avec Freddie Mercury de Queen, et jamais joué en live ensemble. Et tellement d’autres !

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Nous avons sélectionné trois albums seulement car tous reconnus comme les meilleurs de David Bowie pour de multiples raisons que nous allons évoquer. Hunky Dory, The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars et Low ont le point commun d’être issus des années 70. N’hésitez pas à réagir en commentaire sur ces albums ou sur d’autres.

Pour rester au UK, nous vous conseillons aussi la lecture de l’article des meilleurs albums des Beatles.

Explication de Hunky Dory (1971)

Pourquoi ne pas démarrer l’analyse des meilleurs albums de David Bowie par Space Oddity ? Car Hunky Dory marque un tournant majeur dans la carrière de l’artiste britannique. La guitare devient un instrument d’accompagnement, derrière un piano quasi omniprésent. Bowie s’éloigne volontairement de l’univers rock n roll et électrique.

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L’univers “pop” est de plus en plus présent. L’album est marqué par le passage de Bowie aux Etats-Unis début 1971. Il s’inspire de cette culture pour même en sortir trois titres-hommages à trois monstres de la culture US : Andy Warhol, Bob Dylan et Lou Reed (Velvet Underground).

Bowie frappe un grand coup avec Changes. Au-delà de la beauté pure de ce titre, les paroles intriguent car parlent de la transformation de la musique de Bowie lui-même, telle une introspection lucide. Il prend ses distances avec le monde du rock. Il continue son éternelle mue en icône pop, voire icône tout court. Ce sont souvent les détails qui vont de grandes musiques. Tout comme Michael Jackson et ses “cris”, ou My G-G-G-G-Generation de The Who, David Bowie marque Changes d’une certaine manière avec une allitération en “Ch“. Comme s’il était apeuré lui-même des changements à venir.

Oh! You Pretty Things indique encore que David Bowie vit d’influences. Le titre est d’ailleurs de source occultiste (Aleister Crowley), ainsi que proche des idées de Nietzsche. Le Homo Superior que Bowie voit remplacer le Homo Sapiens pourrait en effet bien être le Übermensch de Nietzsche. Ici, il s’agit de transcender les capacités physiques, intellectuelles et morales de l’Etre Humain. Ces thématiques étaient déjà évoquées sur le titre The Supermen issu de l’album The Man Who Sold the World (1970). Ainsi que tu le titre Quicksand qui clot la face A de l’album Hunky Dory. Eight Line Poem arrive comme une conclusion de Oh! You Pretty Things.

Avec Life on Mars?, David Bowie continue la construction de son personnage fictif de Ziggy Stardust, qui ne naîtra officiellement qu’avec la sortie de l’album The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars. Il continue car l’univers de l’espace fut introduit initialement avec la chanson Space Oddity de l’album éponyme de 1969. Life on Mars? est étonnamment aussi une parodie volontaire de Frank Sinatra et de son My Way, qui lui même a repris le titre Comme d’habitude chanté par Claude François. Peut-on oser dire que Claude François aura inspiré David Bowie ? Peut-être pas 😉

Reste Kooks qui est une chanson en écrite par Bowie pour son fils Duncan, alors nouveau-né. The Kooks, groupe britannique de Brighton fondé en 2004 porte ce nom en hommage à Bowie.

Sur la face B, nous pouvons retenir Andy Warhol qui est évidemment un hommage direct au monstre de la culture et de l’art pop. Fun fact : la star Andy Warhol lui-même a détesté le titre. De son côté, Bob Dylan est cité directement sur Song for Bob Dylan. Il n’a jamais commenté publiquement ce titre. Bowie n’entre pas dans la parodie pour plutôt tenter l’exercice de style : guitare folk et même la voix. Queen Bitch termine le trio de tribute cette fois-ci en hommage à Lou Reed (The Velvet Underground).

Queen Bitch est la chanson la plus rythmée de l’album et qui participe d’ailleurs à poser les bases du courant glam rock en naissance au UK. Les costumes, les déclarations, le maquillage et les frasques fréquentes du Bowie de l’époque sont autant de facteurs qui légitiment cet artiste comme l’un des fondateurs du glam rock. Situation magistralement confirmée avec l’album suivant.

Hunky Dory se termine sur une chanson absolument incompréhensible : The Bewlay Brothers. A force de chercher à toujours donner du sens aux chansons de Bowie, on en oubli presque que parfois l’Art n’a aucun sens. Peut-être est-ce le cas ici.

Explication de The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars (1972)

L’album The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars est pour nous le plus représentatif de ce que David Bowie et sa musique furent. Concept-album. Personnages fictifs. Univers spécial. Bowie joue sur tous les tableaux jusque sur scène et dans les médias. L’album signe aussi le retour des accents rock n roll mis de côté sur Hunky Dory.

Le nom de l’album est plus complexe qu’il n’y parait. Ziggy Stardust est évidemment le personnage créé de toute pièce par David Bowie. The Spiders from Mars est en réalité un groupe accompagnant Bowie et formé de Mick Ronson (guitare), Trevor Bolder (basse) et Mick Woodmansey (batterie). The Rise and the Fall décrit l’arc narratif du personnage de Ziggy Stardust lors de son périple pour sauver l’Humanité qui n’est pas prête à recevoir de l’aide d’un extra-terrestre décadent.

L’espace et l’univers avait déjà été expérimentés par Bowie avec Space Oddity et Life on Mars? sur les précédents albums. Il s’agit aussi des meilleurs pistes de ces albums. Ziggy Stardust est la consécration de l’univers fantastique de Bowie. Il faut préciser que cet album n’a initialement pas été conçu pour compter une grande histoire mais l’impact culturel sera tel que le story-telling en fera un concept-album à part entière.

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L’histoire du concept-album démarre avec Five Years. Cette chanson raconte l’avertissement que la Terre reçoit d’une annihilation à venir. On peut penser que Ziggy Stardust vient prévenir les humains que dans 5 ans, plus rien n’existera.

Soul Love est une critique ouverte de l’idolâtrie. L’amour tel que Bowie le décrit devrait être pur d’un Etre à un autre Etre. Sans manipulation politiques, religieuses, raciales, militaires, médiatique… L’adolescent qui semble être au centre de la chanson est en quête de ce fantasme idolâtre, ce qui ouvre un royal chemin pour l’arrivée de Ziggy Stardust.

Mais avant cela, Moonage Daydream ressemble à la folie traversée par ce même adolescent en recherche de symbolique. La chanson ne semble pas avoir beaucoup de sens avec de nombreuses parles incohérentes. Heureusement, musicalement le titre est excellent avec un crescendo menant au salvateur solo de guitare. Apothéose ? Non, pas encore car Ziggy Stardust n’est pas encore entré sur scène !

Et c’est le cas avec Starman qui est donc “The Rise”. Après les avertissements de Five Years, l’extra-terrestre androgyne et bisexuel décide de venir sur Terre et de prendre les choses en main, tel un sauveur. Starman est une critique ouverte des médias qui sur-valorisent les idoles et participent à la fabrique de personnages. L’Humanité veut reconnaitre Ziggy Stardust comme son Sauveur et commence à aimer sans savoir. Alors que nous avons vu grâce à Soul Love que l’Amour devrait être plus simple. Bowie serait-il en train de critique sa propre médiatisation ?

It Ain’t Easy revient de nouveau sur l’idolâtrie pour remettre une couche en plus de Love Soul. Cette fois-ci en ciblant spécifiquement la religion. La manière dont les paroles sont chantées par Bowie rappelle le sermon d’un prêtre dans une Eglise. Les chœurs eux semblent être l’écho de la foule de fidèles suivant aveuglément le leader religieux. Plutôt que de chercher à changer les choses nous-mêmes, nous nous reposons sur Dieu…

La face A est terminée après avoir dépeint un Monde en déperdition qui ne peut être sauvé que par une puissance externe. La face B démarre avec l’arrivée de Lady Stardust telle une déesse asexuelle ou bisexuelle mélangeant les genres. Lady Stardust prend la position de leader d’un groupe de rock. Cette Lady Stardust est par ailleurs une Star. Plutôt que d’être écoutée pour ses paroles annonciatrices d’un désastre à venir, il/elle est adulé par ses fans.

Hang On to Yourself est le début de la chute (The Fall). Lady Stardust, aka Starman est tombé dans le piège de l’idolâtrie. Le propos annonciateur initial est perdu dans des fêtes et un style de vie dépravé. Le début de la fin, donc, pour le Messie censé sauver la Terre mais tombant dans le piège de la notoriété ?

Heureusement, la chanson Ziggy Stardust apporte quelques éclairages. Car tous ces explications de l’album reposent en grande partie sur des théories et une appréciation propre du concept-album. Evidemment qu’il existe d’autres lectures. Ziggy Stardust décrit la déchéance pure : “Making love with his ego Ziggy sucked up into his mind“. Pour être allé trop loin dans la relation entre ses fans (on dirait followers maintenant), pour avoir pris trop de place en tant que Idôle, Ziggy Stardust se fait tuer : “When the kids had killed the man I had to break up the band“.

Suffragette City évoque la relation de Ziggy Stardust avec une femme possessive qui lui interdit de voir ses amis hommes. La chanson parle des relations de supériorité entre sexes. Alors même que Ziggy Stardust est censé être bisexuel. Bowie n’évite pas le débat et montre que les relations hommes / femmes sont bien plus complexes qu’il n’y parait. La star Ziggy devint fan d’une femme. Les rôles sont inversés en privé.

Pour clore l’histoire, David Bowie enfonce le clou du lifestyle dépravé. Rock n Roll Suicide revient sur les événements de la chanson Ziggy Stardust et des instants de la mort de Ziggy. Pourtant assassiné par ses propres fans, il lance un message d’espoir sur l’Amour tout en avouant avoir été trop loin.

Que peut-on retenir de cette longue histoire ? Face à un futur noir et des révélations terribles de fin de l’Humanité, il ne faut pas se laisser décourager. Il ne faut pas non plus tomber dans la symbolique et l’idolâtrie quelque soit son origine : religion, média, politique.

Explication de Low (1977)

Attention, Low n’est certainement pas l’album le plus accessible de David Bowie pour le grand public. Alors même qu’il fait un carton notamment au UK lors de sa sortie. Pourquoi alors mettre Low dans cette analyse des meilleurs albums de David Bowie ? Il y a une logique :

Honky Dory est un album de rupture avec le monde du rock. Dominé par le piano.

The Rise and Fall of Ziggy Stardust and the Spiders from Mars est la naissance de l’icône pop David Bowie.

Low est le renouvellement de l’artiste s’ouvrant à beaucoup plus d’expérimentations sonores et musicales. A chaque album son histoire. Il faut aussi noter que cet album s’inscrit dans la période nommée “Berlin Trilogy” de Bowie de 1977 à 1979 durant laquelle il enregistre trois albums. Lors de ce séjour à Berlin Ouest, Bowie s’immerge dans la culture locale (jusqu’à chanter en allemand sur Heroes !). Ces albums sont influencés par les autres artistes de l’époque : Kraftwerk, Neu!, Tangerine Dream, entre autres. La scène électronique allemande est alors en avance sur son temps. Kraftwerk en est le meilleur exemple avec les prémices de la techno… en 1975 !

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Et Low propose un nouvel esprit avant-gardiste dans la musique pop pre-electro pre-post-rock. Le son est souvent très ambiancé à l’image de la piste Speed of Life d’ouverture totalement instrumentale. A grands renforts de synthétiseurs, Bowie s’engouffre dans un nouveau registre qui marquera des générations de musiciens à commencer par la vague post-rock.

Warszawa extrêmement expérimentale, cette chanson a nécessité l’usage de technologies spécifiques de mixage de l’époque basé sur une grande quantité de sons et de voix. Ce morceau a un rendu très mystérieux à la limite du psychédélique. Troublant et émouvant à la fois, le titre évoque des sentiments de malaise plus que de bonheur. Quasi intégralement instrumentale, les quelques paroles entendues ne sont pas en anglais.

La suite de l’album est de la même teneur expérimentale. Ce n’est clairement pas l’album le plus connu de Bowie. Ni le plus facile à écouter. Il manque de titre phare connus et reconnus même 40 ans plus tard. En revanche, il est fortement manquant par ses prises de parties de style. En rupture encore une fois.

Auriez-vous mis un autre disque dans ce top 3 des meilleurs albums de David Bowie ? Si oui, pourquoi ?

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